samedi 19 février 2011

Barhein : et maintenant à qui le tour ?

Hummm, çà chauffe au Moyen-Orient, chers lecteurs, et ce n’est pas uniquement à cause du soleil. Nous avons eu l’Egypte, désormais nous avons le Yemen, la Jordanie et surtout Barhein.
Où cela s'arrêtera t’il ?

Toute la péninsule arabique va t’elle s’embraser comme on nous le claironne de tous côtés avec des airs de panique pour les uns et de gourmandise pour les autres ?

Humm, pas sûr, pas sûr, et pour plusieurs raisons.

- Premièrement les pouvoirs en place, à commencer par les Saoudiens, sont désormais prévenus des dangers qu’ils courent grâce au précédent égyptien. De plus ils savent que s’ils ne sont pas prêts à faire face au péril par eux-mêmes, l’exil leur tend les bras ; n’ont-ils pas eu la preuve, toujours grâce à l’Egypte, que les USA les lâcheront sans vergogne, eux leurs alliés indéfectibles, si les intérêts US sont amenés à diverger des leurs ?

- Deuxièmement Barhein risquerait d’entraîner dans sa chute toute la péninsule arabique, et en particulier l’Arabie Saoudite dont 30% de la population est chiite (Barhein 70%).

- Troisièmement Barhein sert de base à la 5ème flotte US ce qui en fait le centre névralgique de toute l’ossature militaire US pour assurer la sécurité du détroit d’Ormuz et donc le passage de 20% du pétrole dont le monde a besoin pour survivre.

Pour toutes ces raisons il nous parait hautement douteux que les Saoudiens d’une part et les Américains d’autre part laissent le régime barheini s’écrouler sans rien faire, même au nom de cette démocratie dont ils sont si friands...

Nous parions donc que le schéma égyptien se renouvellera : apaisement, négociation, concessions, quitte à faire sauter quelques fusibles comme le détesté Premier Ministre actuel ; tout cela a déjà débuté comme le prouverait la propulsion sur le devant de la scène du Prince Héritier, Salman bin Hamad Al Khalifa, reléguant à l‘arrière-plan le PM. Eventuellement, si l’expulsion du PM ne suffisait pas, on pourrait envisager le remplacement du roi par le Prince Héritier.

Et si cela ne suffisait toujours pas, c’est-à-dire s’il n’y avait aucune solution de rechange acceptable ni pour les Saoudiens ni pour les Américains ?

Dans ce cas il y aura du sang dans les caniveaux pour deux raisons : d’une part l’armée barheini est composée de mercenaires étrangers sunnites qui n’ont aucun scrupule à tirer sur des chiites , comme ils l’ont déjà prouvé ; d’autre part si les dirigeants barheinis perdaient le contrôle des évènements les Saoudiens se chargeraient de régler le problème eux-mêmes, à leur manière. Connaissant le régime gageons qu’ils ne feront pas dans la dentelle car il leur faut éviter à tout prix que la contestation ne s’étende à leur propre population chiite qui vit dans l’Est du pays où se trouvent concentrées les plus grandes réserves pétrolières du Royaume. Et puis pour des wahhabites les chiites sont pires que des renégats ; donc plutôt un de moins qu’un de plus.

Alors à qui le tour désormais ?
A notre avis il n’y aura pas d’autre tour dans la péninsule arabique, à la possible exception du Yemen. Et il est très probable que le régime barheini se maintiendra moyennant quelques liftings et le retour à la constitution de 1973. Tout le monde y contribuera quelque soit le prix à payer car ce dernier sera toujours moins élevé pour les Saoudiens et les Américains que si Barhein devenait soudainement indépendant sous l'égide d'un gouvernement chiite, même non islamiste.

Si nous nous trompions, ce qui est parfaitement possible, alors, cher lecteur, « the american way of life » chère au Président Busch Sr. ne sera plus qu’un lointain souvenir.
Quant à nous, nous devrons nous remettre à la bicyclette... entre autre.

vendredi 11 février 2011

Moubarak à la porte ; de quoi nous réjouissons-nous ?

Cette fois çà y est, ils l’ont eu !
Ce fût dur, on put même craindre un instant qu’il parviendrait à se cramponner à son poste jusqu’en septembre et l’on eût quelques sueurs froides lorsqu’il annonça qu’il restait au lieu d’annoncer son départ.

Mais non, il s’était seulement trompé de discours.
Où alors il est gâteux.
Où alors il voulait rester...
Probablement les deux à la fois.

Bref il est parti ; officiellement, pour de vrai, garanti par les militaires pour six mois. Avec çà les égyptiens sont sauvés c’est sûr et certain !

Donc on se réjouit, tout le monde danse, crie, pleure de joie et embrasse le voisin de palier à qui mieux mieux.
Bien tout çà, très bien, mais si on y pense deux secondes à froid, qu’est ce qui a changé au juste ?

Certes le symbole le plus voyant du régime établi par Nasser en 1952 a fini par partir. En réalité ses bons amis l’ont destitué pour éviter de sauter eux-mêmes. Il fallut le menacer car le bougre refusait de se laisser scalper sans rien dire ; quel culot tout de même ! Ses meilleurs alliés, c’est-à-dire les USA et les militaires, ont fini par le menacer pour le faire céder afin que tout change sans que rien ne change ; pour eux en tout cas.
Et pour le moment.

Car si les symboles sont importants, nous ne le nions pas, il n’empêche que Moubarak n’était pas seul, loin s’en faut. Tout le système sur lequel reposait son pouvoir, l’appareil du parti, la police secrète, la multitude de fonctionnaires et tous les cronies bénéficiant des salaires et des privilèges de l’appareil d’état, tous ces féaux sont toujours aux commandes avec la ferme intention d’y rester pour conserver leur part du gâteau.

Avec les militaires nommés par l’ex raïs désormais aux commandes (comme anticipé dans le post du 5 février) bénéficiant de l’appui de l’appareil d’état entretenu et soigné par Moubarak pendant 30 ans il reste encore quelques barrières de taille avant de lever tous les doutes qui nous assaillent quant à l’opportunité des réjouissances.
Car, quoi qu’on dise, le pouvoir est toujours aux mains de ceux qui le possédaient avant hier, Moubarak en moins.

Le régime ne s’est pas effondré, loin s’en faut. Peut-être sortira t’il même temporairement renforcé par cette épreuve si les choses restent en l’état. Dans le cas contraire il ne faudra pas sous-estimer la détermination de l’armée à ne pas céder, quitte à utiliser la force, pour restaurer « l’ordre » avec l’appui, les conseils et les encouragements des Américains et des Israéliens.

Moubarak est parti, certes. Mais si Égypte se trouve déjà à la fin de sa révolte, alors non il n’y a aucunes raisons de se réjouir.
Et ce d’autant moins que la situation de fond du pays reste sans issue (voir post 5 février) et qu’un changement réel de régime n’y changera pas grand chose.

jeudi 10 février 2011

Chômage US : Magie où sorcellerie ?

Comme on sait la magie çà n’existe pas, surtout en économie.

Quant à la sorcellerie, à voir.

Jugez-en par vous-mêmes.

D’après les résultats publiés vendredi dernier par le BLS (Bureau of Labor Statistics) le chômage US serait passé de 9,4 % à 9 % (13,8 millions) en un mois et de 9,8 % à 9 % depuis deux mois alors que les créations d’emploi ne se sont élevés qu’à 36.000, c’est-à-dire une augmentation quasiment imperceptible...

C’est pas magique çà ?

Et tous les médias de déférence de s’exclamer en choeur sur ces chiffres miraculeux, cette baisse du chômage la plus rapide depuis trente ans, cette preuve absolue que la reprise est bel et bien là, vigoureuse et au sommet de sa forme grâce à l'ineffable hélicoptère Ben (Bernanke pour ceux qui ne sont pas intimes) ; oui, elle est revenue la croissance, elle est là au milieu de nous tous dans son habit de lumière, même si aucun d’entre nous ne l’a encore reconnue...

Et pour cause !

Mais alors comment réconcilier ces deux données, la baisse du chômage et la non-création d’emploi si elles sont toutes les deux justes ?

Eh bien c’est très simple ; tout dépend de la méthode de calcul.

Il se trouve que la manière de calculer le chômage aux USA fût modifiée sous Clinton en 1994. C’est de cette façon que l’administration a pu faire baisser le taux de chômage à une vitesse proprement, oui oui c’est çà, magique de 8% à 4% en deux ans.

Par le plus grand des hasards c’était une année de campagne électorale.

Inutile de souligner non plus que les administrations suivantes se gardèrent bien de revenir à l’ancienne méthode de calcul.

Or selon cette dernière, de loin la plus proche de la réalité, le taux de chômage US serait aujourd’hui de 22,2 % et non de 9 % !

Avouez que cela fait une différence tout de même !

Pourquoi un tel écart ?

Tout simplement parce-que la méthode de calcul actuelle « oublie » de prendre en compte :

1) ceux qui sont au chômage depuis plus d’un an (44 % du total des chômeurs réels)

2) ceux qui ne pointent pas chaque fin de semaine

3) ceux qui ont un petit boulot à temps partiel en attendant de retrouver un vrai job à temps plein.

Vous voyez bien, cher lecteur, ce n’est pas sorcier tout de même, hein !

C’est ainsi que le BLS est parvenu à faire disparaître purement et simplement d’un coup de crayon magique les 600.000 chômeurs environ qui sont passé à la fin de l’année dernière dans la catégorie « chômeurs longue durée », c’est-à-dire au chômage depuis plus d’un an.

Car un chômeur de plus d’un an n’est plus un chômeur, qu’on se le dise !

D’ailleurs çà n’existe pas.

La preuve ? Eh bien on ne les retrouve pas dans les chiffres du chômage US délivré par le BLS Vendredi dernier...

Et ne venez pas pinailler avec votre mauvaise foi de français sceptique et cartésien s’il vous plait !

Car ici nous sommes chez Barack au pays des merveilles, ce meilleur des mondes où l’on déverse des trillions de dollars qui n’existent pas par hélicoptère sans provoquer d’inflation, et où l’on rend invisible 600.000 individus d’un coup de crayon magique.

Alors, magie où sorcellerie ?

samedi 5 février 2011

Nous serons tous des Egyptiens ; c'est une question de temps...

En dépit des cris d’enthousiasme et d’encouragement des intellos occidentaux en mal de sensations fortes ; en dépit des heurts entre manifestants pro-Moubarak et anti-Moubarak ; en dépit du fait que le pays est paralysé depuis 11 jours ; en dépit des tortillements frénétiques, embarrassés et maladroits des USA (comme des Européens) vis-à-vis de leur allié de trente ans dont ils cherchent désormais à se débarrasser tout en aménageant une transition militaire vers un nouveau régime sous contrôle... En dépit de toutes les négociations souterraines en cours, en dépit d’un éventuel changement de régime dans le calme, eh bien malgré tout cela la situation en Égypte est tout sauf prévisible. Personne n’a vu venir les événements d’aujourd’hui et bien peu ont la lucidité suffisante, et l’imagination, pour voir où tout cela risque de mener.
Car on a le tord de ne voir dans les causes de cette révolte qu’une affaire politique. Ce qui tient lieu de «pensée» dominante clame à tord et à travers qu’une fois le régime renversé tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes inimaginable. Changeons le régime et pfuitt, comme par magie, la situation deviendra idyllique instantanément.
Or c’est faux.
Car la politique n’a eu qu’un rôle très secondaire dans le déclenchement de cette histoire.

Si vous lisez nos journaux de désinformation officiels, sans parler des médias d’abrutissement subventionnés, vous pourrez aisément croire que les Tunisiens comme les Égyptiens, sans parler de ceux qui risquent de suivre leur exemple, se sont presque spontanément réveillés un beau jour pour se jeter dans la rue à seule fin de renverser des gouvernements vieux de trente années soudainement devenus insupportables à leurs yeux. Comme si en une nuit tous les Tunisiens et tous les Égyptiens s’étaient tout à coup rendu compte qu’ils vivaient sous des régimes qui ne facilitaient pas vraiment la liberté politique ; comme si en une nuit toutes ces populations maintenant dans les rues s’étaient réveillées soudain d’un long somnambulisme qui les avaient empêché jusqu’alors de se rendre compte de ce qui se passait dans leurs pays.

Eh bien, chers lecteurs, au risque de vous décevoir une fois de plus, nous vous devons la vérité : ce n’est pas l’amour de la liberté qui a jeté les gens dans la rue. En effet pourquoi hier plutôt qu’il y a trois où dix ans si c’était si insupportable que cela ? Nous ne sommes pas en train de vous dire que ces régimes étaient des exemples de décence politique ; nous ne sommes pas en train d’affirmer que ces régimes n’avaient pas de police secrète qui torturait ceux que les Américains leur livrait à défaut de le faire eux-mêmes ; non, pas du tout, mais il s’agit seulement de ne pas tomber dans le piège qui consisterait à gober ce que nos intellos de salon veulent nous faire accroire : qu’il s’agit uniquement d’une question de régime politique.
Non, la nature du régime politique n’est pas la cause de ces révoltes populaires dont nous parlons, ce n’est pas le facteur premier qui a déclenché la révolte, même s’il était sous-jacent depuis longtemps. Ce n’est qu’un des facteurs parmi d’autres mais certainement pas ni le premier ni le plus important.

La principale cause de toute cette agitation populaire n’est donc pas la liberté où la nature du régime mais quelque chose de beaucoup plus prosaïque ; oui c’est malheureusement beaucoup moins poétique, beaucoup moins idéologiquement correct, peut-être même un peu plouc, mais n’en déplaise à nos révolutionnaires de salon c’est pourtant une question vitale dans tous les sens du mot qui a mis le feu aux poudres.

En fait il s’agit d’argent.
Oui nous savons, chers lecteurs, c’est navrant et terriblement matérialiste pour les purs esprits désintéressés de nos bobos parisiens où new-yorkais, mais il n’en demeure pas moins que c’est ainsi.

Sachant que la majorité des Égyptiens survit avec moins de $ 2 par jour, entassés dans les bidonvilles des grandes agglomérations ; sachant que 20% de cette population est au chômage et que 20% n’a qu’un travail partiel qui lui permet à peine de survivre, on peut imaginer sans peine les conséquences catastrophiques pour tous ces gens d’une augmentation même minime du coût de la vie.
Nous voulons parler ici, soyons concrets, des conséquences de l’inflation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie sur un budget journalier de $ 2 par jour.
Car c’est bel et bien l’inflation qui a jeté les Égyptiens comme les Tunisiens dans les rues sans parler de ceux qui ne manqueront pas de suivre ailleurs. Evidemment c’est moins «glamour» que la liberté, la démocratie et tutti quanti, surtout lorsque tous ces beaux concepts sont vus à travers les lorgnettes dorées du faubourg Saint Germain où du Village de NY...

Quelques piqûres de rappel :

Pour rendre un peu moins insupportable à la population Égyptienne sa condition plus que précaire, l’état Égyptien subventionne lourdement deux domaines, également essentiels pour les 84 millions égyptiens qui s’entassent sur les bords et dans le delta du Nil (surface totale de 40.000 km carrés) créant la plus forte densité de peuplement au monde ( 2000 habitants / km carré). $ 2 par jour signifie que la plupart du revenu de plus de la moitié de la population Égyptienne est consacré à la nourriture (on est loin des 5% -10% comme aux USA où en Europe).

1) La nourriture est précisément l’un des postes les plus subventionnés par l’état Égyptien. L'Égypte importe environ 40% de ses besoins de nourriture y compris le blé dont il est le plus gros importateur du monde, étant obligé d’acheter sur le marché international environ 60% de ses besoins de cette denrée. Hors l’année dernière le prix du blé a doublé ce qui a entraîné une hausse importante du prix de cette céréale pour la population en dépit des subventions gouvernementales. Malheureusement, comme on sait, toutes les matières premières ont vu leurs prix augmenter d’une manière phénoménale. Une augmentation des prix que les Égyptiens ne peuvent pas assumer pas plus que leur gouvernement (nous verrons pourquoi plus bas).

2) Outre la nourriture le second domaine le plus lourdement subventionné par l’état Égyptien est l’énergie.

Les exportations égyptiennes de pétrole n’ont jamais été très importantes mais elles ont longtemps procuré un revenu suffisant au gouvernement pour lui permettre de payer les importations de nourriture et l’énergie (gaz naturel et pétrole) destinée au marché interne, le tout à des prix très largement subventionnés afin de les rendre abordables pour la population (D’après une étude des Nations-Unies le coût des subventions pour l’état Égyptien fut équivalent à 1,1% du GDP pour la nourriture et à 5,1% pour l’énergie au cours de la période 2009-2010). Cependant, depuis une dizaine d’année, la production de pétrole n’a pas cessé de décliner à tel point que depuis l’année dernière Égypte n’exporte pratiquement plus de pétrole ce qui a entraîne de facto un manque à gagner essentiel pour le pays.
C’est ainsi que la conjonction de la fin de ses revenus pétroliers avec les facteurs économiques que l'on sait et surtout le problème démographique initial (voir plus bas), tout cela a placé le gouvernement égyptien dans une situation inextricable que l‘on peut résumer de cette manière :

1) une population qui augmente de manière alarmante : 4 millions en 1800, 9,7 millions en 1900, 21 millions en 1950, 84 millions en 2011
2) ce qui implique des importations de nourritures massives en hausse constante puisque l'Égypte ne parvient plus à produire que 50% de ses besoins de nourriture (Alors que ce pays fût non seulement auto-suffisant mais exportateur de céréales pendant la plus grande partie de sa longue histoire notamment au cours de la période romaine dont il était le grenier à blé indispensable puisqu’il nourrissait Rome elle-même)
3) or les prix de ses denrées (soft comodities) s’envolent en raison de deux phénomènes concomitants :
- une demande nouvelle de nourriture qui explose, en provenance d’Asie notamment ;
- une offre qui se réduit due en partie aux mauvaises récoltes liées aux aléas climatiques
5) des revenus en forte diminution en raison de la fin des exportations de pétrole ce qui entraîne une baisse des subventions à la nourriture et à l’énergie pour la population qui, de ce fait, ne peut plus faire face à l’inflation qui n’est plus que partiellement compensée par les subsides du gouvernement.

Il est désormais plus que probable que les événements d'Égypte risquent de n’être qu’un prélude à ce qui va se produire de plus en plus fréquemment dans les prochaines années tout autour de la planète. En effet une population mondiale qui s'accroît toujours plus, des populations nouvelles qui accèdent à des niveaux de vie auxquels elles ne pouvaient que rêver auparavant (notamment les BRIC) ce qui implique une demande explosive de céréales et de viande en particulier, une offre de produits agricoles qui se réduit en raison de problèmes climatiques mais aussi de terres arables qui disparaissent pour loger des populations en expansion (Chine, Égypte par exemple), tout cela tire désormais les prix des denrées alimentaires inexorablement vers le haut ce qui créera des situations politiques et sociales explosives et potentiellement catastrophiques.

L'Égypte est à cet égard le triste et parfait exemple qui conjugue tous ces facteurs comme un cas d’école créé tout exprès pour les besoins de la démonstration.

Cette raréfaction des produits agricoles, et conséquemment la hausse de plus en plus violente de leurs prix, entraînera une «compétition» de plus en plus féroce entre les pays importateurs de nourriture, et notamment de céréales. «Compétition» est le terme édulcoré pour désigner une guerre véritable dont l’enjeu est tout simplement la vie où la mort pour des millions d’individus qui sont désormais menacés par le spectre de la famine (rappelez-vous 2008 chers lecteurs) bien que la plupart n’en soient pas encore conscients.

Ces pays importateurs se divisent en deux groupes qui ne se définissent pas par leur localisation géographique. En effet c’est beaucoup plus « vulgaire » que cela : d’un côté il y a les pays qui ont les moyens de payer et de l’autre ceux qui ne les ont pas. L'Égypte ne le peut pas, d’où ce qui s’y passe aujourd’hui. La Tunisie non plus. Mais à ce groupe nous pouvons ajouter l’Algérie, la Jordanie, la Syrie et le Pakistan (à ne pas oublier ô combien), tous importateurs de nourriture et dépourvus de pétrole pour les payer au prix fort. Dans ces pays-là il est presque inéluctable que les famines à venir entraîneront des bouleversements politiques importants, voire des guerres si les dirigeants successifs quels qu’ils soient ne parviennent pas à résoudre ces problèmes; et on ne voit pas très bien comment ils le pourraient.

En face nous avons les pays riches qui peuvent payer leurs importations de nourritures au prix fort : les monarchies du Golfe, l'Arabie Saoudite, la Libye, la Chine, l’Inde, le Japon etc... Tant que leurs gouvernements auront les moyens de payer leur nourriture il est probable qu’il n’y aura pas trop de tensions politiques où sociales. En revanche si un jour l’un d’entre eux, pour une raison où une autre, se retrouvait à court de trésorerie, des émeutes se déclencheraient certainement entraînant la chute du régime en place.

Nous en sommes là aujourd’hui en Égypte. Mais le changement de régime qui s’annonce ne changera rien aux problèmes de fond qui menacent le pays car le nouveau gouvernement, quel qu’il soit, se trouvera toujours avec à une population en expansion qu’il ne pourra plus nourrir et à laquelle il ne pourra pas plus donner de travail étant donné qu’une large partie des industries qui employaient de nombreux Égyptiens s’est délocalisée en ... Chine ; et ne parlons pas de tous les problèmes «annexes», si l’on peut dire : c’est-à-dire la pollution, le manque d’eau potable, les problèmes sanitaires dus notamment à l’absence d’infrastructures urbaines comme le tout à l’égout etc... sans compter ces maladies que nous avions soit-disant «éradiquées», choléra par exemple, qui réapparaissent de manière inquiétante.

En vérité la situation Égyptienne est un concentré de la situation à laquelle est confrontée l’humanité dans son ensemble.
C’est pourquoi à plus où moins long terme nous serons tous des Égyptiens.
Mais pour le moment tout le monde se réjouit à Cochon sur Terre, le meilleur des mondes.